Les «Guerrabas» – Une attraction touristique disparue de Tanger
Dans le bon vieux temps, on croisait le porteur d’eau, appelé communément El Guerrab. Il se baladait dans les rues, squattent les places bondées, les coins populaires, les cimetières, les marchés animés, et les parcs publics. Il était là, remplissant sa gourde d’eau pour étancher la soif des passants, surtout lorsque la chaleur devenait insupportable.
Le métier de porteur d’eau à Tanger est une pratique ancestrale qui a perduré depuis de nombreuses décennies. En costume traditionnel, les guerrabas, faisaient donc partie prenante du paysage culturel marocain. Ils offraient aux voyageurs et aux habitants de la ville la possibilité de se désaltérer moyennant quelques pièces. Jadis, leur fonction s’est transformée en un rôle plus symbolique, contribuant à la préservation du patrimoine culturel de la ville. En effet les touristes étonnés par leur habit coloré aimaient se faire photographier en leur compagnie, surtout qu’à l’époque, le ministère du Tourisme leur délivrait une carte annuelle qui leur permettait d’approcher les touristes sans risquer de se faire chasser.
Pour la plupart, le Guerrab fait partie des plus beaux souvenirs de l’enfance. Petits et grands ont tous croisé le chemin du vendeur d’eau, une figure qui ne passe jamais inaperçue avec son sourire chaleureux, son costume rouge flamboyant, orné de motifs en cuivre, ou en argent et son magnifique chapeau multicolore (tarazza), cerné de ponpons, son sac en cuir fait de peau de chèvre sur son épaule, symbolisant la diversité du Maroc. Le Guerrab cliquète, sa petite cloche à la main, émettant son distinctif « Dring, dring », réveillant instantanément la soif des passants, tendant une tasse en cuivre remplie d’eau aux passants dans l’espoir d’en convaincre quelques-uns pour prendre une gorgée. L’odeur envoûtante de l’huile de cade « qatrane » que dégage son outre (guerba), ravive les sens les plus profonds. Comme le dit le dicton : « Fais bouger la jarre, et l’assoiffé apparaît ». Le vendeur d’eau était un personnage intemporel, défiant les époques et les coûts de la vie, et était une attraction touristique incontournable, malheureusement l’arrivée des bouteilles d’eau en plastique l’a fait disparaitre.
Les porteurs d’eau considèrent leur profession comme une source de fierté. Souvent hérité de génération en génération, ce métier est perçu comme une mission sacrée visant à préserver une tradition en voie de disparition. L’outre, le chapeau, les pièces décoratives en argent et en cuivre, ainsi que les gobelets représentaient un patrimoine précieux, estimé à plusieurs milliers de dirhams, que tous aspiraient à léguer aux générations futures. Cependant, cela est soumis à la condition que cette activité demeure suffisamment lucrative pour assurer leur subsistance.